HYPERCONDRIAQUE

Hypocondriaque n’est pas suffisant. Compte tenu de l’atmosphère générale angoissante, de l’anxiété liée à la pandémie, il fallait un mot plus impérial.

Dans les temps anciens, cette affection évoquait des douleurs dans la zone située sous le cartilage des côtes droites que les médecins ne pouvaient, à l’époque, déceler. D’où les patients étaient pris pour des individus souffrant d'une maladie fictive.

Or, les hypo, super, hypercondriaques peuvent assurer que ce n’est pas fictif du tout.

Tout bobo les alerte. Michel Drucker, le maître en la matière, déclare : "qu’au moindre coup

de fatigue il consultait un Cardiologue, un pneumologue, un neurologue, un otorhino, un ostéopathe, un diététicien et qu’avec le Covid-19, il sortait avec son scaphandre"

Au cours de cette période de stress, on imagine volontiers ce tourment que partagent d’autres hypercondriaques connus (Michel Blanc, Denis Brognart, Mika, Julie Delpie, Xavier Dolan … ) ou anonymes. Un nez qui coule (Covid ou allergie?), une quinte de toux (Covid ou parce que l’on a avalé de travers), essoufflement (Covid ou 10 kms sur home trainer ou 1h de stepping ?)

Eventuellement rassuré par l’inexistence des symptômes connus, voilà que tous les jours on en identifie d’autres, légitimant ainsi les soupçons de la veille ! Le mal de ventre d’hier, le gros orteil qui a enflé, l’ajout du sel pour donner du goût au ragoût…

En outre, l’hypercondriaque ne se contente pas de souffrir hier et aujourd’hui, il se projette toujours dans un avenir rempli d’inquiétudes médicales.

Il faut reconnaître que les informations et prévisions sanitaires ne contribuent pas à la zénitude absolue :

- La liste énoncée par le docteur Salomon en fin de journée est terrifiante. On a l’impression que la grande faucheuse tient ses comptes à jour et nous fait signe.

- A-t-on trouvé un traitement ? Nada ; mais que fait la multitude de labos, instituts, professeurs, chercheurs. Sont-ils plus enclins à occuper leur temps à se tailler des croupières plutôt qu’à nous concocter le médicament miracle ?

Parfois, j’ai l’impression que c’est pour bientôt, qu’au-delà de la chloroquine, le traitement est quasiment dans notre pharmacie et…patatras ; hier, deux chercheurs de l’Université de Sichuan « remettent en cause toutes nos croyances ». Ce matin, ce sont des scientifiques de l’institut Pasteur qui démontrent que le virus était en France, en catimini depuis quelques temps, infectant sans attendre son homologue chinois ou italien.

L’ennemi était-il donc déjà sur place, invisible, sans manifestation belliqueuse, attendant son heure, favorisant ainsi l’explosion de la viralité complotiste.

- Quand aurons-nous un vaccin ? : 18 mois, 2 ans, jamais ! Didier Raoult vient encore d’ajouter au marasme général en déniant l’utilité de la recherche d’un vaccin (et au passage, en qualifiant de pétainistes ses ex-collègues du Conseil scientifique …… Ambiance).

A l’écoute de toutes ces bonnes nouvelles, comment l’hypercondriaque peut- il ne pas se sentir mal et ne trouver refuge que dans le confinement éternel ?

Stratégies du mensonge et vérités alternatives, désarroi des scientifiques, rodomontades de quelques illuminés…A qui faire confiance ?

Moi-même, habituellement optimiste et quasi insouciant, j’ai éprouvé le besoin de me rassurer ; j’ai commencé par m’autodiagnostiquer tous les jours grâce au site https://maladiecoronavirus.fr/ ; il s’agit d’un questionnaire dopé à l’intelligence artificielle. Pas très fiable, à chaque fois, il a estimé que je me portais comme un charme et que je devais rester chez moi. Trop rassurant pour ne pas procéder de la manipulation organisée par la Chine, le Gouvernement, les labos, Amazon, la finance en général…

J’ai décidé d’en avoir le cœur net et suis revenu au contact humain ; j’ai appelé le SAMU.

Ci-dessous la relation de cet échange gardé en mémoire à fins de conforter les données sanitaires ou …psychiatriques.

« SAMU: Avez-vous pris votre température ?

Moi : 3 fois par jour. Ai-je de la fièvre ? Allons-donc, je frôle 37°3. Il ne marche pas comme je voudrai ce thermomètre. L’impertinent.

SAMU: Quel est votre médecin ?

Moi : Un grand médecin, professeur, chercheur, scientifique, Dr Donald Purcon.

SAMU: Cet homme-là n'est point écrit sur mes tablettes entre les grands médecins. De quoi dit-il que vous êtes malade ?

Moi : Il dit que c’est que c’est du foie mais c’est aussi la rate. SAMU : ignorant. C’est du poumon que vous êtes malade.

Moi : Du poumon ?

SAMU: Oui. Que sentez-vous ?

Moi : Je sens de temps en temps des douleurs de tête. SAMU Justement, le poumon. Moi : Il me semble parfois que j’ai un voile devant les yeux. SAMU: Le poumon. Moi: J’ai quelquefois des maux de cœur. SAMU: Le poumon. Moi: Je sens parfois des lassitudes par tous les membres.

SAMU : Le poumon. Moi: Et quelquefois il me prend des douleurs dans le ventre, comme si c’étaient des coliques. SAMU: Le poumon. Vous avez appétit à ce que vous mangez ? Vous aimez à boire un peu de vin ? Moi : Oui, Monsieur. SAMU : Le poumon. Il vous prend un petit sommeil après le repas, et vous êtes bien aise de dormir ? Moi : Oui, Monsieur. SAMU: Le poumon, le poumon, vous dis-je. Que vous ordonne votre médecin pour votre nourriture ? Moi : Il m’ordonne ma potion d’un litre de gel hydroalccolique par jour SAMU: Ignorant. Moi : Du désinfectant Destop en intraveineuse. SAMU : Ignorant. Moi : Des ingestions d’UV A,B, et C SAMU: Ignorant. Moi : Des bouillons de culture SAMU: Ignorant. Moi : De la vodka allongée d’eau de javel (automédication partageant les recommandations du Dr Donald Purcon et de son homologue biélorusse) SAMU: Ignorant. Moi : Et le soir de petits pruneaux pour lâcher le ventre ( NDLR : autre prescription du Dr à tous ses patients armuriers).

SAMU: Ignorant. Moi : Et surtout de boire uniquement du vin californien SAMU : Ignorantus, ignoranta, ignorantum. Il faut boire votre vin de Bordeaux; et pour épaissir votre sang qui est trop subtil, il faut manger du bon foie gras, de bon gros charolais, de bons fromages de Normandie, du bon kouign amann, gaufres et moëlleux au chocolat pour coller et conglutiner. Votre médecin est une bête. Je veux vous en envoyer un de ma main. »

Vous pardonnerez cet indigne plagiat du malade Imaginaire (Acte 3 – scène 10). A remarquer que Molière, visionnaire, se préoccupait déjà des maladies respiratoires.

Je n’ai pas osé signaler au SAMU que le docteur Donald Purcon m’avait en premier lieu recommandé une potion traditionnelle en vogue dans certaines contrées : une infusion composée de gingembre, d'amandes et de peaux d'orange, qui a pour but d'évacuer les toxines des poumons (il a modifié l’ordonnance quand il a constaté qu’il s’agissait d’une médecine traditionnelle chinoise)

Hymne à l’hypercondriaque

https://www.youtube.com/watch?v=mluu9VIGifQ

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