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  • Photo du rédacteurLes instants du temps

RDV



« En raison d'une forte demande, ce centre de vaccination n'a plus de disponibilités : Réessayez prochainement ou cherchez un autre centre ».


Cette phrase laconique, implacable, ce refus obstiné, cette absence de communication, n’expriment pas une convivialité excessive ou la prise en compte d’une population aux portes de la psychiatrie !

Impression désagréable de rencontrer le personnage classiquement obtus, désespérément administratif, qui s’écrit :

« Sgrogneugneu ! suis occupé, allez-vous faire voir, piquer, ailleurs ».


En ce qui me concerne ces rendez-vous « en ligne » ont autant de succès que la pêche «à la ligne». Aucune prise, pas même un soupçon d’épinoche.


Tout se fait en ligne, désormais, confirmant et pérennisant la distanciation sociale. En ligne les services, les réunions, les émotions artistiques…même les danses se font en ligne. Imaginez Guy Bedos tentant de draguer Sophie Daumier à l’occasion d’un slow en ligne !


Certes, il est, encore, possible de tenter, en désespoir de cause, le téléphone, mais la prise de rendez-vous peut ressembler plutôt à une prise de bec ou une prise de tête.

C’est ce qui m’advint :

« Non, madame, ce n’est pas pour une prise de sang. Il y a méprise. Je suis actuellement aux prises avec un stress important et je n’ai personne en ligne. Vous devez être en prise directe avec la planification. »

Disant cela, je lui donnais prise sur moi et, sa surprise passée, elle profita de son emprise pour me conseiller de lâcher prise.


Il est vrai que les rendez-vous pour raisons sanitaires sont, majoritairement peu réjouissants. Le but même du rendez-vous est générateur d’angoisse mais les conditions logistiques, en elles-mêmes, possèdent un caractère inquiétant. C’est que le RDV est d’abord avec la salle d’attente. 15 minutes en face à face avec le professionnel de santé, précédées de 2 heures en salle d’attente. La station prolongée dans cette ambiance augmente nettement les symptômes pathologiques. On regarde ses pieds et les autres « patients » très malades et forcément contagieux, on inspire et expire longuement, on se rogne ou se lime les ongles, mais c’est pas bien, on se tait, on médite, on prie. Heureusement, nous échappons, désormais, à la lecture des vieux hebdos, bouillons de culture nous renseignant sur les déboires conjugaux de tel ou tel, d’il y a 1 an.





Arrivé peu malade, on se demande pourquoi un tranquillisant a été rajouté à l’ordonnance.


Par bonheur, tous les rendez-vous ne sont pas aussi sinistres et certains peuvent produire un effet apaisant, réconfortant, porteur d’espoir.

C’est le cas du premier rendez-vous galant.


A dire vrai, ce dernier n’est pas sans risques et peut, également, susciter autant l’espoir que le stress. Aussi vais-je me permettre de vous rancarder pour que vous ne soyez pas mis au rancart dès le premier rancard, surtout au temps de la COVID.



Actuellement, en raison du télétravail, du couvre-feu, tout commence en ligne : vous kiffez grave ! vous envoyez à l’élue des sms enflammés à toute heure, vous lui dites des mots d’amour en le/la regardant au fond des yeux à travers l’écran de la webcam, vous lui postez des fleurs virtuelles sur le net ou vous commentez ses moindres faits et gestes avec des smileys enflammés sur FB …


Et peut arriver le moment d’un premier RDV «en vrai».


Conseil n°1 : Soigner sa présentation, comment s’habiller ?

La question n’est plus costume 3 pièces ou T/shirt avec messages, maquillage de star et lèvres pulpeuses, barbe et/ou tatouage ? mais masque standard ou en tissu fantaisie ?



Peu importe, s’il dévoile un peu de votre personnalité, il est un parfait rempart pour celles et ceux qui ont tendance à «repousser du goulot » ou dont la dentition est quelque peu hétéroclite. Tout est dans les yeux. Les pupilles dilatées sont interprétées comme un signe d’attraction sexuelle. Autrefois, les femmes se mettaient des gouttes de belladone dans l’œil pour dilater leurs pupilles.


Quelques preuves :

« La courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur ».

Paul Eluard


« La lumière que je préfère C'est celle de vos yeux jaloux » G Brassens


Conseil n°2 : Le lieu du RDV est d’autant plus important que les endroits adéquats s’amenuisent. Restaurants romantiques et pas trop chers fermés, pour les bars et lieux de festivités il faut d’abord consulter le dark Web.

Il reste le banc pourri devant la gare sur lequel le grand Jacques a attendu son merveilleux

et chimérique amour, sa Madeleine, sous une pluie battante, détrempant ses lilas qu’elle aimait tant.

Ce soir j'attends Madeleine Mais il pleut sur mes lilas Il pleut comme toutes les semaines Et Madeleine n'arrive pas


On peut, également, signaler les galeries marchandes désœuvrées, mais elles procurent, assez peu, l’intimité nécessaire à la réussite d’un premier contact.

Aussi, je préconise de prolonger l’amour en ligne sur un site de rencontre, solution moins romantique mais conforme à l’air du temps et au vent mauvais de la Covid.


Conseil n°3 : Si, par le plus grand des hasards ou de l’inconscience, la rencontre physique a lieu, se pose la question de l’heure du RDV.

Plusieurs problématiques sont en jeu, si bien que quelques applications récentes et opportunistes permettent de tenir compte des critères suivants: le lieu, le mode de déplacement, les risques météorologiques, les prévisions du Bison Futé, l’interface avec Waze, pour identifier un horaire compatible avec le couvre-feu.

Ces applications ne tiennent toutefois pas compte d’une donnée comportementale aléatoire : le retard.



Certaines personnes se servent inconsciemment du retard pour tester l'autre et la force de son affection. Une façon de s'assurer des sentiments de l'autre malgré ses propres erreurs.

- Elle : être en retard s’impose, je me fais désirer

- Lui : être en retard s’impose pour marquer l’importance de ma vie professionnelle et

en outre, elle sera en retard.

Elle et lui, jamais, ne se rencontrèrent et durent s’acquitter des 135 euros d’amende pour non-respect du couvre-feu.


On peut, toutefois, accorder quelque plaisir à certains RDV ratés comme,

par exemple, la poésie cosmographique suivante :



Mais la lune n'est pas là et le soleil attend

ci-bas, souvent chacun pour sa chacune

Chacun doit en faire autant

La lune est là, la lune est là

La lune est là, mais le soleil ne la voit pas"





Ou celle, plus animalière de Juliette Gréco :


« Un petit poisson, un petit oiseau S'aimaient d'amour tendre Mais comment s'y prendre Quand on est dans l'eau »






Conseil n°4 : Eviter les embûches de la conversation

La parole est bizarrement moins fluide alors que le masque se remplit de gouttelettes.

Fuyez les banalités. Par exemple, un prestigieux site de rencontres conseille d’engager la conversation avec «quel est le super-pouvoir que tu aimerais avoir ?» plutôt qu’avec «tu fais quoi dans la vie ? ».


Sérieusement, je n’y aurais pas pensé !


Il convient également de ne pas être trop direct :

«tu as chopé l’anglais ou le sud-africain ? »

ni d’ahaner les phrases d’auteurs célèbres apprises presque par cœur...

n’est pas Lucchini qui veut !

« Il faudrait que je cessasse de vivre pour cesser de vous aimer. »

ou pour les taiseux :

« Je suis plein du silence assourdissant d’aimer. »

sans pourtant, trop en faire :

« Je dédie à tes pleurs, à ton sourire,

Mes plus douces pensées,

Celles que je te dis, celles aussi

Qui demeurent imprécisées

Et trop profondes pour les dire. »


Conseil n°5 : le comportement adéquat

Ne pas regarder son téléphone, sauf pour savoir si on est en présence d’un cas contact ou, encore, en solution de sortie de secours pour s’échapper d’un premier rendez-vous décevant.




Si tout se passe bien, ne pas, néanmoins, avoir d’attentes trop hautes au premier RDV, à savoir, ni plan cul, ni attaches émotionnelles. Prenez le temps d’envisager tous les aspects que la situation présente peut occulter, et, en particulier, le masque qui peut être facteur de désenchantements.



Mais, je m’égare et le temps est passé très vite. J’en ai oublié ma prise de rendez-vous vaccinale, je retourne en ligne.



Comme «Il n'y a pas de hasards, il n'y a que des rendez-vous», je vous engage à vous inscrire sur ce blog afin que je puisse comme le chante Georges Brassens continuer à avoir rendez-vous avec vous.


« Les Instants du temps » ont bénéficié du concours opportun de Sade, Louis Aragon, Emile Verhaeren, Paul Eluard, Juliette Greco, Georges Brassens, jacques Brel.




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